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lundi 15 février 2010

Signéponge, de Jacques Derrida (livre paru en français en 1988)

Jacques Derrida a prononcé une conférence en présence de Francis Ponge lors de la décade de Cerisy-la-Salle qui lui a été consacrée pendant l'été 1975. Ce texte n'est paru en français dans sa version définitive qu'en 1988. Treize années se sont écoulées entre la conférence et sa publication intégrale en français.

Jacques Derrida présente une interprétation, en insistant pour dire que ce n'est pas la seule qu'on puisse faire. Ce n'est ni clef ni une explication générale. C'est une lecture parmi d'autres.

Quand Francis Ponge décrit une chose, quand il se met à son service, il passe avec elle un contrat. J'écris un texte, je le signe en mon nom propre, mais le texte tel qu'il en résultera, ce sera ta signature à toi, la chose. Chaque fois, il écrit un texte unique, irremplaçable. Ce texte, une fois fini et signé, une fois arrêté, devient une chose, la chose. Son texte est une opération, un acte, ce qu'on appelle une mise en abyme : en se désignant lui-même comme texte, il fait en sorte que la chose se désigne elle-même comme chose, et le résultat de l'opération, c'est que Ponge se désigne lui-même comme Ponge, c'est-à-dire comme une chose, une éponge. C'est ainsi qu'opère Ponge, et c'est ainsi que l'écriture fonctionne aujourd'hui. En me donnant à moi-même mon nom, je me tiens aussi proche de la vérité. J'en jouis. Mais cette vérité est tout autre. Elle me dicte ma loi (qui est la sienne), y compris et surtout là où j'affirme le plus ma singularité. En citant Ponge, Jacques Derrida se cite lui-même. Il développe sa théorie de l'auto-affection, de la marque/re-marque. Il institue, il monumentalise sa signature qui, comme celle de Ponge, se décompose dans le texte.



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