Rechercher dans ce blog

mercredi 25 novembre 2009

Par-delà le langage? Remarques sur la logique des images (Gottfried Boehm, 2004)

Aucun livre de Gottfried Boehm n'ayant été publié en français, le site trivium.revues.org a publié un article qui donne une idée des thèses défendues par ce chercheur allemand. On trouve le texte intégral de l'article sur cette page.

Selon Gottfried Boehm, les images possèdent une logique propre qui n'appartient qu'à elles. Elles engendrent du sens par la perception, sans prédicat ni parole.

Si l'on est amené aujourd'hui à avancer cette hypothèse, c'est parce qu'un tournant fondamental s'est produit dans notre culture. Depuis le 19ème siècle, l'image foisonne. Ce foisonnement n'est pas seulement quantitatif. Il correspond au développement de moyens iconiques nouveaux, qui rendent l'image irremplaçable. Celle-ci a ceci de commun avec les chiffres qu'elle ne recourt pas au langage pour se fonder. Aujourd'hui, certains savoirs ne peuvent être acquis que par l'intermédiaire d'instruments d'imagerie (par exemple la radiographie ou les diagrammes), et pas autrement.

Dire qu'il y a une logique des images, c'est dire qu'il est possible d'engendrer du sens sur un modèle qui n'est pas celui de la proposition langagière. C'est prendre acte du fait que les images possèdent une force, un pouvoir et un sens propres. On peut, par l'iconique, élargir le logos au-delà de la verbalisation, et même si l'ombre du langage continue à planer au-dessus de cette signification, cette propriété - qui a toujours existé - ouvre, dans le contexte de la modernité, des champs nouveaux.

Des philosophes comme Husserl et Wittgenstein ont démontré au 20ème siècle que le langage reposait sur des moyens extra-linguistiques. La parole est basée sur la métaphore, sur l'action d'indiquer et de montrer. Sans la langue imagée du quotidien qui s'appuie sur des contextes flous, on ne pourrait ni consolider le logos, ni fonder les savoirs. Notre perception ne peut saisir un donné, une chose que sur le fond d'un horizon fluctuant, ininterrompu et potentiel. Cet indéterminé dans lequel nous nous mouvons est la base du déterminé. On ne peut penser la prédication linguistique sans le divers, le polysémique et le sensuel. Or ceux-ci caractérisent l'image - et la légitiment dans le champ même du logos.

lundi 23 novembre 2009

Le talith et la parokhet selon Jacques Derrida, Mireille Calle-Gruber et Marc-Alain Ouaknin

Jacques Derrida a écrit en novembre-décembre 1995 un texte intitulé, Un ver à soie - Points de vue piqués sur l'autre voile. Ce texte est encadré par deux souvenirs d'enfance :
- il entendait les femmes de sa famille, qui tricotaient, parler de diminution [un geste qui ne consiste pas à défaire le tricot, mais à travailler ses bords].
- vers l'âge de 12 ans, il a élevé des vers à soie dans une boîte à chaussures.

Dans les deux cas, c'est un fil d'origine animale (la laine, la soie) qui est travaillé pour en faire un tissu (une trame, un cocon). Entre ces deux souvenirs, Jacques Derrida évoque un autre tissu qui lui vient du passé : son talith, châle de prière juif [en principe, le talith est en laine]. Son grand-père lui avait donné un talith blanc qu'il avait l'habitude de caresser, de toucher. Mireille Calle-Gruber avance une hypothèse : quand Jacques Derrida nous fait don de son texte, le texte qu'il signe de son nom, il nous fait don d'un talith. Ce don est comme le don d'une langue, une langue en plus (la déconstruction). Me voici l'homme au talith dit-il [lui qui s'identifie à Abraham]. Ce Me voici ne porte pas sur une personne, mais sur un texte.

En quoi son écriture est-elle un talith? Elle n'est pas une écriture de la vérité. Elle ne dévoile rien, elle ouvre. Sur la scène de la langue, elle secrète un fil de soie qu'elle ne maîtrise pas. Elle s'en remet à lui. Ce fil qui vient de l'intérieur de la langue (par auto-affection) s'invente au fur et à mesure. C'est une production de l'autre, une réponse de l'autre. Et voici qu'arrive le papillon qui perce l'écorce, résultat imprévisible pour l'enfant et aussi pour le signataire du texte. Le texte-talith a surgi dans un temps d'effacement, de diminution, sans défaire la langue, comme naguère les tricoteuses qui diminuaient, mais ne défaisaient pas le tricot.

On peut rapprocher ce texte-talith du texte-parokhet auquel nous introduit Marc-Alain Ouaknin. La parokhet est le rideau qui, dans le temple, séparait le Saint du Saint des Saints. Au début du Ver à soie, Derrida l'évoque, s'appuyant sur plusieurs traductions du texte biblique. La parokhet est une oeuvre double. D'un côté [vers le secret], elle est faite par un artiste; de l'autre [vers la visibilité], elle est fabriquée par un artisan. De même, le texte de Jacques Derrida est double. Son écriture est un corps à corps, un tatouage, un vêtement qui le saisit au vif, comme un animal. Il parle, il tisse avec les peaux. Le texte, revêtu de la signature, est un point de croix qui coud le propre et le non-propre, l'intime et l'hétérogène. L'écriture traverse, unit, déchire et répare. Elle pique, elle blesse. Elle est une liturgie. On la porte comme on porte un châle sacré.

Selon Ouaknin, la parokhet, lieu central du temple de Jérusalem, donne à voir l'invisible [paradoxe apparent : le voile se voit comme le peuple hébreu voyait les voix]. Cette tension entre visible et invisible est celle du texte. Quand on interprète, le caché ne se révèle pas. Le texte, retiré, reste inaccessible. Il se manifeste pudiquement, derrière le rideau, comme deux seins de femme se dessinant sous un voile. On ne peut jamais se l'approprier, mais seulement le caresser. On retrouve ici le talith de Jacques Derrida.

Châle de prière, le talith n'est pas un signe de foi, mais de méditation et de mémoire. Sa fonction est apotropaïque. Il ne garantit rien, mais il protège, il déplace comme la vie. Objet unique, qui répète et commémore des événements uniques (le don de la loi, la circoncision), il offre une communication avec l'inconnu, l'imprononçable. Son fil est comme un omphalos de l'écriture, un schibboleth.

jeudi 19 novembre 2009

Michael Fried, "La place du spectateur"

Ce texte de Michael Fried, publié en anglais en 1980 et traduit en français en 1990, a fait l'objet d'une analyse (idixation) dont on trouvera le résultat résumé sur cette page.

Sous le titre général Esthétique et origines de la peinture moderne, ce livre est le premier d'une série de trois qui comprend aussi Le réalisme de Courbet et Le modernisme de Manet. Il porte sur la mutation qui est intervenue dans la peinture française dans la seconde moitié du 18ème siècle, qui allait conduire à l'invention de la peinture moderne au siècle suivant.

Vers 1750, avec Chardin puis d'autres peintres comme Greuze, émerge un nouveau concept de tableau : celui où les personnages, absorbés dans leur activité, s'isolent du regard du spectateur. Michael Fried appelle cet état absorbement. Il est théorisé par Diderot, qui valorise le silence, la solitude, l'oubli de soi, la méditation. Les personnages ne s'adressent pas au spectateur, mais s'expriment à l'intérieur de la scène. De cette façon, l'intensité dramatique de la peinture s'exerce de la façon la plus intense. Parallélement, la peinture se théatralise. Son expérience est conditionnée par la présence du spectateur à l'intérieur même du tableau. Dans les deux cas, la perspective classique traditionnelle, basée sur un spectateur localisé en face du point de fuite, est abandonnée.

Pour résoudre ces antinomies, il faudra trouver de nouvelles solutions techniques. David s'attellera à cette tâche en multipliant les points de vue, avant que les tableaux ne se réorganisent autour de la présence constitutive du spectateur, avec Manet.

mardi 17 novembre 2009

Jacques Derrida, "Un ver à soie" (Revue Contretemps n°2-3)

Le texte de Jacques Derrida, Un ver à soie, a été publié dans la revue Contretemps n°2-3 (hiver-été 1997). On trouvera sur cette page la présente analyse ainsi que les propositions qui y sont rattachées.

Ce texte a une dimension autobiographique. Il est daté et divisé en trois chapitres correspondant à un périple d'environ deux semaines en Amérique du sud : Vers Buenos-Aires (24 nov - 29 nov 1995); Santiago du Chili - Valparaiso (29 nov - 4 déc 1995); Sao Paulo (4 déc - 8 déc 1995). Sur la base des thèmes abordés (l'enfance algérienne, la langue, la circoncision, le judaïsme, le talith), on peut dire qu'il prend la suite de deux autres textes autobiographiques, eux aussi précisément datés : Circonfession (entre janvier 1989 et avril 1990), et Le monolinguisme de l'autre (23 au 25 avril 1992).

Un ver à soie juxtapose deux thématiques qui se croisent mais restent distinctes :
- qu'est-ce qu'un talith (châle de prière juif), en quoi se distingue-t-il du voile?
- que nous dit le texte d'Hélène Cixous, Savoir - qui porte sur l'opération de l'oeil qu'elle a subie pour guérir sa myopie - sur l'oeil, la vision et la question du voile?

Le point commun à ces deux thématiques est l'unicité. Une fois, une fois unique, Hélène Cixous a été opérée de l'oeil, c'est un événement réel, daté, qui conduit à l'écriture d'un texte qu'elle signe. Une fois, une fois unique, un garçon est circoncis, et le talith qui rappelle cette circoncision, lui aussi unique, commémore le don de la loi à Moïse, événement unique.

Jacques Derrida se rappelle un souvenir d'enfance, quand il cultivait des vers à soie dans une boîte à chaussure. Sans aucune intervention extérieure, ces petits animaux vivants fabriquaient du fil, jusqu'au jour - imprévisible - où le cocon se perçait. Le papillon partait sans laisser d'adresse. Plus tard, il a pris l'habitude de toucher le talith que lui avait légué son grand-père. En faisant cela, il ne cherchait pas à dévoiler quoi que ce soit. Il répétait le geste d'auto-affection qui caractérise les vers à soie.

La logique du talith n'est pas celle de la vérité, mais celle de l'unicité. Il enveloppe un seul corps pour la prière, la bénédiction, la mort. Il n'est pas tourné vers la parole, mais vers l'imprononçable, comme le parokhet. C'est ainsi qu'on en finit avec le voile.

dimanche 4 octobre 2009

Le monolinguisme de l'autre (Jacques Derrida, 1996)

On trouvera sur cette page les propositions issues de l'"idixation" de ce texte de Jacques Derrida, prononcé dans une première version en 1992 et publié en 1996.

Il y aurait une période autobiographique de Jacques Derrida avec deux textes, Circonfession, rédigé entre janvier 1989 et avril 1990, et Le monolinguisme de l'autre, prononcé pour la première fois en avril 1992. Dans le premier, Jacques Derrida parle de sa mère mourante, et dans le second, il évoque sa langue maternelle absente. Il ne parle presque jamais de son père, et quand il évoque sa généalogie, "judéo-franco-maghrébine", c'est en termes généraux. Il se situe comme Juif maghrébin, et non pas comme fils, petit-fils ou arrière-petit-fils d'Untel.

Jacques Derrida n'a qu'une langue, le français. Mais cette langue n'est pas la sienne, elle n'est pas sa langue maternelle. C'est la langue de l'autre, celle de la puissance coloniale et de la culture. Même s'il peut s'exprimer en d'autres langues, il est monolingue. Il ne peut parler que cette langue-là (son idiome), et en même temps il lui faut plus d'une langue (une définition de la déconstruction). Ce réseau de contradictions, d'antinomies, situe l'expérience insituable dans laquelle il est né. Depuis toujours (avant même sa naissance), il s'est fait le gardien d'une langue qui renvoyait à un ailleurs, un dehors absolu.

La langue, comme la mère, est l'unique irremplaçable - mais qu'il faut remplacer. On la vit comme sienne, mais chaque fois qu'on ouvre la bouche, on promet une autre langue. Tout se passe comme si une marque, tracée à même le corps, obligeait à accueillir un hôte incompréhensible, à parler autrement, à greffer, à transformer cette langue qu'on respecte. Comment s'approprier l'inappropriable? Par l'écriture, l'invention linguistique, la poésie. La langue n'en revient pas. Certes, c'est une folie, mais une folie messianique par laquelle j'adresse mon salut au tout-autre.

mardi 15 septembre 2009

Tsimtsoum, Introduction à la méditation hébraïque, par Marc-Alain Ouaknin (1992)

On trouvera sur cette page des propositions issues de ce texte de Marc-Alain Ouaknin qui présente dans le même mouvement le hassidisme (un courant du judaïsme né au 18ème siècle) et le retrait (tsimtsoum), un concept de la Cabale juive.

Il ne s'agit pas seulement de présenter le tsimtsoum hébraïque, il s'agit aussi de le caresser comme on caresse une lettre ou la sonorité d'un mot, il s'agit de se retirer devant lui, bref, de faire tsimtsoum devant le tsimtsoum. Isaac Louria (1534-1572), dont la courte vie s'est consumée entre d'autres sages à peu près à l'époque de Copernic et de Kepler, n'est pas le créateur du mot, mais il est son inventeur dans la Cabale. Inventer un mot, même s'il existe déjà, c'est fabriquer de nouveaux sens. Pour ce mot-là comme pour d'autres, il y a l'avant Louria et l'après Louria. Donc Dieu s'est retiré (tsimtsoum), il est parti en exil et a laissé quelques brisures (chevirat hakelim) et il nous reste maintenant à restaurer tout ça (tiqoun). De quoi alimenter quelques controverses n'est-ce pas? Quelques controverses et aussi une éthique, celle du commencement.
-------
p9 : Avant-Propos
p17 : Première partie : Voyages d'une étincelle
p19. 1. Le hassidisme aujourd'hui.
p26. 2. Les origines du hassidisme.
p30. 3. Le palais des vases brisés : les thèmes fondamentaux de la nouvelle Cabale.
p37. 4. Le voyage des étincelles.
p42. 5. Créer le messie.
p45. 6. Les dérives du messianisme : Shabataï Tsevi et Jacob Frank.
p60. 7. Le Baal Chem Tov : le fondateur du hassidisme.
p63. 8. L'opposition au hassidisme.
p67 : Deuxième partie : la sagesse dansante du hassidisme.
p121 : Troisième partie : Corps et graphie, petit traité de méditation hébraïque

jeudi 10 septembre 2009

Totalité et infini, essai sur l'extériorité (Emmanuel Lévinas, 1961)

J'ai (enfin) suffisamment avancé dans l'analyse de Totalité et Infini, ce texte fondamental d'Emmanuel Lévinas publié en 1961, pour faire une petite pause. On trouvera sur cette page son "idixation" sous la forme d'une centaine de propositions. Parallèlement j'ai mis en place un "vocabulaire lévinassien" - qui reprend certains de ses concepts, et j'ai ouvert une page à son nom. Tout cela pour préparer le terrain à l'analyse d'autres textes, qui ne manquera pas de suivre.

Lévinas fait preuve d'une audace et d'une originalité qui, presque cinquante ans plus tard, ne laissent pas d'étonner. Sans doute cette pensée était-elle en lui depuis longtemps - mais la voici, dans ce livre, ramassée et compacte, qui surgit toute armée (quoique le modèle ne soit pas vraiment celui d'Athéna, mais plutôt celui de la création divine).

Toutes les philosophies ont, jusqu'à maintenant, été dominées par le concept de totalité, mais il faut rompre avec cela. C'est l'éthique qui doit être au coeur de la philosophie, c'est elle qui est au coeur du langage. Pour la penser, il faut partir de l'extériorité, telle qu'elle se révèle dans le visage humain et dans le dépassement de l'être accompli par le désir. Il faut reconnaître le privilège d'autrui, tel qu'il s'impose par la justice et se vit par la caresse. En se séparant des éléments, le sujet accède à la jouissance. Celle-ci transmute l'autre en même, mais ouvre à la fécondité.

mercredi 2 septembre 2009

"Avances", de Jacques Derrida (1995), suivi de "Le Tombeau du Dieu artisan", de Serge Margel

Jacques Derrida a rédigé, sous le titre Avances, une préface au texte de Serge Margel Le Tombeau du dieu artisan. Il y développe à partir du Timée de Platon (déjà analysé en 1993 dans Khôra), une théorie de la promesse. On trouvera sur cette page une série de propositions issues de l'analyse de ce texte.
Avances est une préface. Son thème est la préhistoire absolue du monde, l'avant, l'en-deça. C'est pourquoi elle ne commence pas par un paragraphe 1, mais par un paragraphe 0 [zéro], intitulé Les devanciers. En 1972, Jacques Derrida affirmait dans La Dissémination qu'il ne pouvait pas y avoir de préface ni de liminaire, pas d'en-deça. Et pourtant il écrit une préface, et pourtant il évoque un point zéro [ou avant le zéro] qu'il appelle la promesse. Car avant toute création du monde, le Démiurge aura promis. Tel est le constat audacieux fait par Serge Margel : certes le Démiurge produit le monde selon des idées, des représentations, mais la seule garantie de survie de ce monde est une promesse. Or cette garantie n'en est pas une, car le Démiurge est mourant. C'est un paradoxe. D'une part, il ne fait plus rien; d'autre part, c'est justement cette mort symbolique qui fait oeuvre. La promesse est infinie, incalculable, et aussi intenable. Elle ouvre un avenir insaturable, imprévisible.

La promesse du Démiurge, comme toute promesse, promettait du bien, mais son retrait, son désoeuvrement et sa mort possible introduisent une menace. Les humains ne peuvent rien faire d'autre que se promettre d'y survivre, sans pour autant se constituer en communauté.

mercredi 22 juillet 2009

Mémoires pour Paul de Man, par Jacques Derrida (1988)

On trouve sur cette page les propositions qui ont été établies à partir de la lecture de ce texte de Jacques Derrida.

A la mort de Paul de Man (1984), Jacques Derrida a prononcé trois conférences "à sa mémoire", et aussi sur le thème de la mémoire, qui est inséparable du deuil, du nom et de la promesse. La mémoire pensante est allégorique. Déconstructrice, aporétique, elle renvoie toujours à autre chose (comme n'importe quel texte). Occasion pour Jacques Derrida de définir la déconstruction : Plus d'une langue (d'ailleurs Paul de Man pratiquait plus d'une langue, entre le flamand, le français, l'allemand et l'anglais).

En 1988, des informations ont été révélées sur des articles que Paul de Man avait écrits pour le journal collaborationniste Le Soir. Que dire de cela sans renoncer à sa responsabilité? Il faut se fixer quelques règles. Parmi celles-ci, l'obligation de ne rien soustraire aux questions déconstructrices. Après tout, c'est ce que Paul de Man, rompant avec son passé, a fait toute sa vie.

samedi 18 juillet 2009

Contre la théatralité - recueil d'essais de Michael Fried paru en 2007 incluant Art et objectité, texte de 1967

On trouvera sur cette page une analyse de ce recueil d'essais de Michael Fried, effectuée selon la méthodologie d'Idixa (idixation).
Art et objectité, texte écrit en 1967 alors que Michael Fried n'avait que 28 ans, a fait l'objet d'innombrables polémiques. Il reste 40 ans plus tard au coeur des préoccupations du critique américain, ami de Clement Greenberg et surtout de Stanley Cavell. Paru en 2007, le recueil contient entre autres un texte justificatif et partiellement auto-critique (De l'antithéatralité) et la transcription d'une conférence prononcée en 2006 (L'autonomie d'aujourd'hui) où certains courants de la photographie contemporaine sont étudiés dans le prolongement des réflexions sur la théatralité.
Selon Michael Fried, l'art minimal (Donald Judd, Tony Smith, Robert Morris) apparu dans les années 1960 repose sur une sensibilité en rupture avec le modernisme. L'oeuvre ne détermine plus un espace séparé du spectateur - celui de l'illusion faisant appel à une conviction, mais partage avec lui le même espace, dans une expérience qui ressemble à celle que vivent le public d'une scène de théatre et les acteurs. Cette situation menace l'existence même de d'art, dans la mesure où l'objet prend la place d'une personne et ne se distingue plus d'un objet quelconque (objectité). Ce courant est en rupture avec les tentatives d'autres artistes comme Frank Stella, Kenneth Noland ou Jules Olitski, et encore plus avec le travail sur la couleur de Morris Louis, qui explorent la substance et la couleur dans leur rapport avec le support pictural.

mercredi 1 juillet 2009

L'art africain entre silence et promesse (Daniel Payot, 2009) [AAESP]

On trouvera à cette page les propositions issues de l'analyse du livre de Daniel Payot (publié en 2009), L'art africain entre silence et promesse.
Daniel Payot a enseigné en Afrique de 2003 à 2007. Il faisait commenter à ses étudiants le documentaire d'Alain Resnais et Chris Marker, Les statues meurent aussi (réalisé en 1953). La thèse du film est que les statues sont mortes avec la culture qui les avait fait naître. Cette mort n'est pas naturelle, c'est le résultat de l'intrusion des Blancs dans un monde qui n'était pas le leur. Il faut en prendre acte : aujourd'hui, ni les Noirs ni les occidentaux ne comprennent leur langue. Les statues sont silencieuses, énigmatiques, et pourtant, malgré cela, elles nous parlent, elles nous fascinent. Elles nous disent : Rien n'est irréparable. Même dans ce monde dominé par la valeur d'exposition, ces statues restent porteuses d'une promesse, celle d'une nouvelle communauté, ouverte à l'altérité, au lointain.
Finalement Daniel Payot développe ici à propos de l'Afrique ce qu'on pourrait appeler une théorie de l'"oeuvre comme promesse", dont il avait tracé les linéaments dans Anachronies de l'oeuvre d'art (1990).

vendredi 12 juin 2009

Penser à ne pas voir (Jacques Derrida, publié en 2005)

On trouvera ici les propositions tirées de ce texte de 24 pages publié dans le premier numéro de la revue de la Fondation créée par le peintre Valerio Adami (Fondazione Europea del Disegno) autour du dessin. Il transcrit une intervention improvisée par Jacques Derrida lors de la session inaugurale de cette Fondation, et est précédé d'un autre texte de 3 pages intitulé Le dessin par quatre chemins, également sous la signature de Jacques Derrida.

Dans cette intervention, Jacques Derrida reprend la plupart des thèmes déjà évoqués dans Mémoires d'aveugle (livre publié en 1990) : selon lui ce qui rend visible n'est pas visible, le dessinateur est aveugle. Mais tandis que dans les années 1960 ou 1970, il considérait la vision sous l'angle du privilège que lui accorde le logocentrisme (héliocentrisme), il la situe désormais plus du côté de l'autre ou du tout-autre, de la différance ou de l'espacement. C'est là qu'intervient l'expérience du dessin. S'il est digne de ce nom, le dessin résiste à la logique binaire du logos, et aussi au politique. Il est spectral, il s'expose à l'événement. Dans la nouvelle configuration historique où nous sommes, il reste à penser.

jeudi 14 mai 2009

Des Libertés Numériques, de Paul Mathias

Le sous-titre retenu pour ce livre pose une question à laquelle Paul Mathias cherche à peine à répondre. Notre liberté est-elle menacée par l'Internet? Quelle liberté? Celle de surfer à volonté, une liberté dont les réseaux peuvent donner l'impression, ou celle d'agir selon son propre désir, un liberté difficilement compatible avec un système balisé par toutes sortes de dispositifs informatiques, commerciaux ou juridiques? Quand l'internaute se sert du web pour certains usages, il accepte de se soumettre à un monde de normes et de procédures qui résulte de compromis informulés entre des acteurs le plus souvent invisibles. Paul Mathias nous parle de cette tension entre une disponibilité immédiate (Je trouve immédiatement ce que je cherche) et l'indisponibilité radicale de cette formidable machine où la technique et le code se confondent jusqu'à absorber la loi (En réalité, ça ne marche pas). Dans cette tension s'inscrit notre rapport à un discours sans cesse reformulé qui est notre discours. Nous prenons part à des communautés volatiles et mouvantes, capables de se continuer, de s'autoréparer et aussi de changer leurs buts et leurs objectifs, de prendre de l'écart par rapport à elles-mêmes. Et si là, dans cet écart, se situait le seul degré de liberté qu'apportent les réseaux? Sans qu'aucune organisation politique structurée ne se forme sur le Web, l'espace public pourrait en être bouleversé.

mardi 28 avril 2009

Le spectateur émancipé (Jacques Rancière, 2008)

Ce texte est le troisième de Jacques Rancière à être analysé selon la méthodologie d'Idixa. On trouve sur cette page les propositions qui ont été établies à partir de sa lecture.
Souvent l'art actuel se veut politique, il se dit art critique. Mais l'est-il vraiment? S'il s'agit de faire prendre conscience aux dominés de leur aliénation, on peut en douter. Ils n'ont pas besoin d'un artiste pour connaître les difficultés dans lesquelles ils se débattent. Ce qui les intéresse, c'est de sortir de la répétition : faire autre chose de leur corps, vivre d'autres expériences sensibles, s'éloigner des contraintes de la vie courante. Vouloir émanciper les masses en faisant triompher le vrai sur l'illusoire, c'est rester dans une logique de la représentation. C'est coller à une éthique avec laquelle, justement, le régime esthétique de l'art cherche à rompre.
L'art de la dénonciation militante n'est pas critique, mais consensuel. Il reste inscrit dans la vieille logique représentative et mimétique, où la rhétorique de l'artiste reste engluée dans ce qu'elle dénonce. L'art véritablement critique est celui qui introduit de la séparation dans le vécu sensible. Désormais l'esthétique n'est pas réservée à une élite supposée savoir. C'est un partage du sensible qui met à distance les hiérarchies établies, une scène de l'égalité où les performances hétérogènes s'échangent. Cela suffit pour que l'art soit politique. Il porte alors les dissensus et les tensions qui font de l'image un objet non descriptible ou réductible à un sens, flottant entre différentes fonctions, pensif. L'artiste libre, insouciant, ne révèle aucun secret caché. Il dérange la connexion usuelle du verbal et du visuel. Par les installations ou la vidéo, il joue des écarts entre différents régimes d'expression.

dimanche 26 avril 2009

Demain les posthumains, par Jean-Michel Besnier

On trouvera les principales propositions issues de ce livre à cette page.
Jean-Michel Besnier commence par constater que les frontières de l'homme sont indéterminées. Où commence la machine? L'animal? L'inerte? Où se termine la culture et où débute la nature? L'humanisme des Lumières était fondé sur la croyance en une spécificité de l'homme, que les technosciences actuelles ignorent. L'homme est formé des mêmes ingrédients que les autres composants de l'univers. S'il a une particularité, c'est d'être ouvert à tous les possibles. Les technosciences de ce siècle (NBIC = nanotechnologies - biotechnologies - informatique - sciences cognitives) menacent son identité de manière irréversible. L'humanité peut transformer la naissance, la maladie et la mort (transhumanisme), elle peut modifier son corps et améliorer ses performances. Sa liaison de plus en plus étroite à la machine change la langue et les relations humaines.
Le livre n'aboutit à aucune conclusion figée. Pour survivre dans son milieu, l'humanité doit reconnaître la dignité du non-humain. On parle d'excès et de démesure, mais ce n'est que le prolongement de ce que l'homme a toujours fait. Le post-humain n'a rien de honteux ni de scandaleux : c'est le chemin par lequel doit passer un autre humanisme basé sur la non-exclusion de l'autre. En-dehors de toute conception mécaniste du monde, il faut accueillir l'inédit. Ce qui émerge est nécessairement inconnu, on ne peut pas le prévoir à l'avance.

jeudi 2 avril 2009

Jacques Rancière, Le partage du sensible

Dans ce petit livre où il répond aux questions de deux jeunes philosophes, Jacques Rancière clarifie sa conception des régimes esthétiques de l'art. On trouvera dans les parcours suivants, selon la méthode idixienne, des éléments repris de ces explications.
- On peut distinguer, dans la tradition occidentale, trois régimes d'identification de l'art : éthique, représentatif et esthétique
- En art, le sensible est partagé selon les mêmes découpages que ceux qui partagent la communauté
- Le régime esthétique de l'art repose sur l'égalité : en n'importe qui peuvent se rencontrer l'activité fabricatrice et l'émotion sensible
- Un tournant éthique affecte aujourd'hui l'esthétique et la politique : un droit humanitaire, de justice infinie, au-delà de tout droit, qui évacue le droit même
- "Post-moderne" est le nom donné à l'échec du modèle téléologique de la modernité

mardi 31 mars 2009

La crise de l'art contemporain, Yves Michaud

Yves Michaud n'a pas de sympathie particulière pour les milieux officiels de l'art; il aurait même plutôt tendance à les rendre responsables de quelques'uns des maux de l'art contemporain : élitisme, esprit de chapelle et conformisme. C'est ce qu'il appelle l'art institutionnel, qui n'a (selon lui) pour légitimité que le respect autiste de ses propres procédures. Il est difficile de lui donner tort! mais difficile aussi de se contenter de cette explication unique de la perte de contact avec le public. D'ailleurs il le reconnaît lui-même, l'art n'est pas réductible à un seul courant, il est multiple, comme le sont les goûts et les normes.
On trouve ici l'ensemble des propositions établies pour l'idixation de ce texte.
Parcours de lecture :
- En art, la pluralité des systèmes de valeur est devenue une norme et une valeur
- L'expérience de l'art institutionnel est conventionnelle : "est de l'art ce qui suit les procédures de l'art".

FRa Angelico, Ressemblance et Figuration, par Georges Didi-Huberman

Ce livre publié initialement en 1990 existe en livre de poche. Il comprend deux parties, l'une axée sur Fra Angelico et la théologie, l'autre plus particulièrement sur les Annonciations, mais les deux parties se recoupent. Georges Didi-Huberman attire l'attention sur les pans, les marques et les traces laissées volontairement (selon lui) par le dominicain florentin et d'autres peintres dans leurs fresques et retables. Ces marques ne sont pas anecdotiques, elles témoignent d'un mystère infigurable.
Je ne résume pas ici ce livre extrêmement dense, mais je renvoie plutôt à cette page du site Idixa où l'on pourra lire la quarantaine de propositions qui en ont été déduites.
Les parcours de lecture proposés dans Idixa sont les suivants :
- L'énigme de la figure, c'est qu'elle cache la chose et aussi y donne un accès, quoique détourné, déplacé
- L'Annonciation chrétienne n'est pas seulement histoire, mais aussi lieu et temps d'un mystère
- Dans les fresques de Fra Angelico, la pensée visuelle laisse des traces et des marques qui invoquent une pensée non visuelle d'ordre théologique
- Le mystère de l'Incarnation est l'enjeu suprême de la peinture chrétienne et son plus grand paradoxe : celui du Verbe incarné
- La peinture chrétienne n'imite pas l'aspect visible des choses, mais des figures mystérieuses, irreprésentables
- La Vierge offre le lieu de l'invisible, du mystère où habite le Verbe]

jeudi 19 mars 2009

Harold Rosenberg, La dé-définition de l'art, la tradition du nouveau

J'ai travaillé sur deux livres d'Harold Rosenberg, tous les deux en anglais, car il m'a été impossible de me procurer les traductions françaises (existantes, mais épuisées) : La Tradition du nouveau et La Dé-définition de l'art.
Harold Rosenberg est connu pour avoir inventé le terme "Action Painting". Mais il était bien plus que cela : un poète, un critique littéraire, un polémiste. Avec un étrange mélange de scepticisme et d'empathie, il a su analyser les tendances de l'art d'après-guerre dans des termes qui n'ont rien perdu de leur actualité. Voici quelques "parcours de lecture" déduits de l'idixation de ses textes :
- L'art de notre époque est pris dans un mouvement de dé-définition qui en fait un objet incertain, ambigu, voire anxiogène
- La "rupture avec la tradition" a duré si longtemps qu'elle a fini par produire sa propre tradition : celle du nouveau
- Les artistes ne peuvent renoncer à la qualité esthétique qu'en investissant massivement les catégories et les discours du système de l'art qu'ils prétendent dénoncer
- La grande nouveauté de l'art aujourd'hui est qu'il n'y a plus d'audience universelle : chaque pratique s'adresse à un segment différent du public
- Le musée moderne doit obéir à une double injonction : 1. S'ouvrir aux formes de vie les moins élitistes; 2. Sanctifier une étroite sélection de héros de l'art
- En agissant avec des matériaux, sans image ni objet pré-conçu, les peintres américains ont inventé l'"Action Painting" où l'oeuvre est un événement, pas un objet
- Le kitsch est un art qui suit des règles établies et prévisibles, à une époque où toutes les règles de l'art sont remises en question par chaque artiste
- L'art de Rothko était un rituel de purification du moi dont la signification ultime, universelle, ne pouvait exprimer que le sentiment de sa propre absence

dimanche 1 mars 2009

L'origine de la perspective, par Hubert Damisch (1987)

Quelle est la place du sujet dans la perspective dite "géométrique" née au quattrocento italien, ce dispositif d'énonciation qui n'a pas fini de nous nous hanter, même si nous ne nous en servons plus? Cette place lui est assignée par la construction (le point de vue), mais elle ne peut lui suffire pour se repérer. Entre des règles de composition rigoureuses (le sujet réduit à un point, à un oeil) et des éléments imaginaires (les figures, la narration), une tension se met en place dès le commencement, c'est-à-dire dès l'expérience de Brunelleschi (1425) et les perspectives urbinates (vers 1460-1500). Elle ouvre une faille irrémédiable dans la culture humaniste. Le sujet y trouve son lieu, mais n'y tient qu'à un fil.

Voici les parcours de lecture que nous a ouvert cette lecture :
- Le paradigme perspectif est l'équivalent visuel d'un dispositif d'énonciation;
- La perspective ne représente rien car elle est la forme même de la représentation;
- La peinture moderne commence quand le lieu du sujet se dissocie de sa construction imaginaire:
- Le sujet de la perspective ne tient qu'à un fil : il ne saurait se repérer dans le dispositif qu'à s'y résorber ou s'y perdre
- Notre culture est travaillée en son tréfonds par le paradigme perspectif
- L'invention de la perspective a ouvert dans la culture humaniste une faille irrémédiable
- Si système de la peinture il y a, il n'est à rechercher ni dans la convention, ni dans l'unicité du tableau, mais dans ce qui fait le ressort de l'oeuvre : répliques, variations, transformations
- L'expérience de Brunelleschi (1425) est le moment inaugural de la perspective artificielle
- Les "perspectives urbinates" montrent la perspective à l'état pur : un habitat vide sans récit ni personnage, dont l'auteur est inconnu et la destination incertaine.

jeudi 5 février 2009

Artaud le Moma

Cette conférence prononcée le 16 octobre 1996 au MOMA de New York a été publiée en 2002 sous ce titre, Artaud le Moma, qui joue sur le surnom qu'Artaud s'était donné à lui-même, Artaud le Mômo. Il y est question d'Artaud, bien sûr, et aussi du musée, et aussi du rapport ambigu qu'Artaud entretenait avec le musée et la muséification. Les propositions que nous en avons retirées sont lisibles à cette adresse. On pourra aussi lire les parcours de lecture :
- L'oeuvre d'art est un acte de maladresse volontaire, un coup dissonant que redouble une consonance qui la fait vivre et survivre;
- Exposer une oeuvre, l'archiver dans un musée et dans l'histoire de l'art, c'est l'ex-poser aux coups et à la différance sans lesquels il n'y a pas de regard.
Désormais les quatre textes de Derrida sur Artaud (deux dans L'Ecriture et la Différence, Forcener le Subjectile et celui-ci) ont été "idixés". On en trouvera des lectures associées à celle d'autres textes dans les trois parcours suivants :
- Derrida, Artaud,
- Derrida, le subjectile,
- Derrida, le musée.

mercredi 28 janvier 2009

Lacan, le regard et le tableau dans le Séminaire XI

J'ai travaillé sur les séances 6 à 9 de ce séminaire, qui sont consacrées au regard comme objet (a), à la peinture et à la fonction du tableau. Pour se voir, le sujet dépend du regard de l'autre, et c'est avant tout ce regard qu'il cherche dans le tableau.

Parcours de lecture :
- Pour qu'il y ait peinture, il faut que je sois regardé : que le tableau soit dans mon oeil, et que moi je sois dans le tableau]
- "Je me vois me voir"; c'est ainsi que le sujet du cogito croit saisir l'objet insaisissable d'où dépend son fantasme : le regard]

Propositions :
- Le visible dépend d'un regard qui préexiste à l'oeil : "Je ne vois que d'un point, mais je suis regardé de partout"
- Le tableau est la fonction où il appartient au sujet de se repérer comme tel
- Pour repérer son désir sur l'image-écran, le sujet humain en joue comme d'un masque au-delà duquel il y a le regard
- Dans les "Ambassadeurs", Holbein rend visible le sujet comme néantisé : objet anamorphique = tête de mort = objet (a) = le -phi de la castration
- La fonction du tableau, c'est de donner l'image apaisante d'une complétude qui se referme
- Il s'agit dans la perspective géométrale de repérage de l'espace, et non pas de vision
- Dans son essence, le visuel n'est pas réductible à la construction spatiale qui constitue la vision
- L'expressionnisme se situe dans un appel direct au regard
- Dans la perspective classique, le sujet est manoeuvré, appelé, pris dans le tableau, son désir est capturé dans le champ de vision
- Le trompe-l'oeil nous capture, car il se donne pour autre chose que ce qu'il n'est

dimanche 18 janvier 2009

Fra Angelico, Diane Cole Ahl

J'ai travaillé à partir du livre de Diane Cole Ahl récemment traduit en français, Fra Angelico, pour ouvrir une page A partir de Fra Angelico, que je vais développer peu à peu en analysant les nombreux excellents ouvrages parus sur le peintre dominicain. Cela m'a conduit à ouvrir deux parcours de lecture : Les Annonciations de Fra Angelico, et Les Saintes Conversations. Ce n'est qu'un début.

lundi 5 janvier 2009

Forcener le subjectile (Jacques Derrida, 1986)

Il m'a fallu de grands efforts pour idixer ce texte d'une cinquantaine de pages publié dans le recueil de Dessins et portraits d'Antonin Artaud édité par Paule Thévenin en 1986. Texte prodigieusement dense qui introduit au concept du subjectile, mot qui n'aura plus jamais le même sens après le double passage d'Antonin Artaud et de Jacques Derrida. [Encore faudrait-il qu'il ait eu un sens avant ce passage, ce qui n'a rien d'évident.] En tous cas Artaud s'en sert trois fois, dixit Derrida, et le sort de l'obscurité.
On trouvera la vingtaine de propositions que j'en ai douloureusement retiré à la page Forcener le subjectile. Je ne me lance pas dans le gigantesque effort de le résumer à nouveau. Le lecteur pourra se reporter aux pages Derrida, le subjectile, et Derrida, Artaud, qui donnent une idée de la difficulté - voire de l'impossibilité - de la tâche qui consisterait à en faire un concept. Le subjectile est une figure de l'Autre, une figure de la Khôra, un support qui devrait se faire oublier mais que rien ne peut empêcher de revenir. C'est un spectre qui ne revient sur ce blog que par effraction.