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jeudi 8 novembre 2012
Un témoignage donné, in "Questions au judaïsme" (Elisabeth Weber et Jacques Derrida, 1996)
Répondant dans cette interview aux questions toujours très pertinentes d'Elisabeth Weber, Jacques Derrida reprend, autour du judaïsme, certains thèmes qu'il a développés ailleurs. Par exemple ce concept fondateur pour lui [mais pas pour le monde, ni pour l'univers], la différance, est-ce qu'il n'opère pas dans son oeuvre comme une eschatologie? Il ne dit pas non. N'a-t-il pas affirmé, une et même plusieurs fois, qu'il était le dernier des eschatologistes, ou encore le dernier des Juifs [ce qui, pour lui, va ensemble - trait d'union qu'on pourrait légitimement discuter]. Le judaïsme lui a été donné avec la langue et la circoncision. Il pourrait refuser cet héritage (ce qu'il ne fait pas), mais il ne peut ni savoir ce qu'on lui a donné, ni le rendre. Il lui reste à survivre avec (ou dans) les paradoxes de l'appartenance, les dissymétries de l'alliance, les incertitudes de l'identité, les impossibilités logiques et les apories qu'il ne cesse de déployer. Tout cela n'est pas spécialement juif, c'est universel. Il suffit de parler, et toc! qu'on soit un homme ou une femme, un européen ou un zoulou, on est d'entrée de jeu bien (ou mal) installé dans l'alliance de la circoncision. Il ne se prive ni ne se lasse jamais d'argumenter autour de cela, mais les preuves sont inutiles, il suffit d'en témoigner. L'extrême humanité de l'homme et l'extrême singularité d'un peuple se rejoignent dans une logique folle. Si le Juif a une place spécifique ou exemplaire dans cette histoire, c'est celle d'une surenchère dans l'écartèlement, dans la dislocation de l'identité.
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